Time-out : que dit la science ?

Clefs pour comprendre le temps mort et 4 principes afin d'en faire bon usage




Le Time-out (littéralement "temps mort") est une pratique visant la mise à l'écart de l'enfant. Il est décrié aujourd'hui : chacun y va de ses arguments et ses références plus ou moins scientifiques... Mais qu'en est-il si l'on s'interroge sur le développement de l'enfant ? Le time-out a-t-il un bien-fondé et si oui lequel ?
Souffre-t-il de dérives à bannir ?
On fait le point sur le time-out !



Qu'est-ce que le Time-out ? (Temps mort - mise à l'écart de l'enfant)

Le Time-out consiste à isoler temporairement un enfant suite à un comportement jugé problématique ou inacceptable.

Il provient de l'anglais Time-out positive reinforcement qui signifie le retrait de tout "renforçateur" (entendez un bénéfice qui va encourager un comportement - comme l'attention d'un parent ou ses encouragements).  

Prenons un exemple : un parent qui de colère, enverrait son enfant "au coin" en lui criant des paroles rabaissantes et le laisserait une durée indéfinie dans cet espace sans même qu'il sache ce qu'il a à y faire; risque fort de laisser l'enfant frustré, humilié, angoissé. Rien qui puisse être considéré comme valable d'un point de vue éducatif.

Prenons un autre exemple : un parent, qui demanderait fermement (sans crier) à son enfant d'arrêter (son comportement) tout en l'incitant à retrouver son calme (quitte à l'aider) dans un espace dédié, en définissant le temps imparti (quelques minutes ou jusqu'à ce qu'il se sente assez calme pour discuter avec le parent par exemple); peut espérer dans ce cas, obtenir la coopération de son enfant qui ne se sentira pas "puni" mais responsable d'un comportement que le parent désapprouve. Ce qui sera le point de départ de l'échange qui s'en suivra (puisqu'on le verra, le dialogue a toute son importance pour la suite).

Par ailleurs, on a tendance à attribuer au Time-out la seule "mise au coin" de l'enfant. Mais ceci est réducteur. En effet, selon des spécialistes en éducation positive, le Time-out peut aller du simple retrait de l'attention envers l'enfant (vécu comme une désapprobation) après qu'il ait eu un comportement inacceptable, voire un retrait du jouet ou de l'activité à partir duquel le comportement est apparu.
Dans les deux cas, il s'agit de ne pas encourager l'enfant dans un comportement que les parents réprouvent et même de l'inciter à en changer.
En absence d'attention (vécu comme une récompense pour l'enfant), il peut se détourner du comportement problème vers un autre que le parent approuvera et même encouragera. 
Ce temps de retrait peut être plus ou moins long et parfois s'accompagne de consignes plus ou moins claires. Par ailleurs, il semble qu'il n'y ait pas une sorte de time-out mais plusieurs, de sorte que ses applications ne se valent pas toutes.

Ce qui vient d'être mis en évidence, ce sont les modalités et conditions dans lesquelles ce Time-out serait appliqué. Il peut donc tour à tour être humiliant ou avoir un caractère éducatif avéré. Par ailleurs, s'il y a time-out, il ne peut avoir de sens que dans la mesure où il est délibérément utilisé par le parent comme une intervention éducative parmi d'autres visant le changement de comportement de l'enfant.

Regardons de plus près ces "conditions" pour y voir plus clair...

Les 3 fonctions du Time-out

Le Temps mort aurait 3 rôles différents : Punir : conséquence désagréable suite à un comportement inacceptable dans le but de diminuer l'apparition du même comportement. Ce qui est très différent de vouloir que l'enfant "souffre de quelconque manière" pour lui "donner une bonne leçon". Au sens premier du terme, il n'y aucune dimension "sadique" à la punition qui doit rester proportionnelle à la gravité du comportement visé. Eteindre le comportement : Viser l'arrêt du comportement en détournant l'attention et stoppant toute éventuelle réponse "encourageant" le comportement problème. Retrouver son calme : Le retrait peut servir à faire baisser la pression (après une crise émotionnelle par exemple) dans le but de pouvoir reprendre ensuite l'activité ou un échange constructif. Le parent peut s'imposer d'ailleurs de la même manière ce "retrait" quand il sent que la "moutarde lui monte au nez"...

Ce que le Time-out ne devrait pas être

La polémique autour de cette notion rappelle néanmoins qu'il existe des dérives volontaires ou par ignorance qui peuvent avoir des conséquences néfastes pour l'enfant...

On a tous en tête une image d'enfant se voyant envoyé dans le coin de la classe après s'être trompé de réponse et se voir couvrir d'un bonnet d'âne sous les rires de ses camarades...
En plusieurs points, cette intervention est au moins inefficace et au plus traumatisante pour un enfant.
- En réponse à son absence de réponse, il se voit privé de la suite de la leçon : quelle pertinence d'un point de vue pédagogique ? Comment peut-il apprendre de son erreur ? Ne risque-t-il pas d'en garder un souvenir néagtif qui l'incitera plutôt à se faire oublier au moment des réponses orales devant la classe plutôt qu'essayer de s'améliorer la prochaine fois ?
- Les moqueries des camarades au sujet de ses oreilles d'âne seront vécues comme humiliantes, renforçant son sentiment négatif au sujet de l'école (dont il pourra longtemps garder un mauvais souvenir).

A l'image de cette représentation populaire de la punition en classe, le time-out (comme n'importe quelle autre intervention éducative) peut devenir néfaste pour l'enfant et contre-productive si l'on se situe d'un point de vue d'une "efficacité éducative".
Le time-out ne devra donc comporter aucun aspect contraire aux besoins de l'enfant (le priver de repas en l'envoyant dans sa chambre par exemple), ni stressant ou angoissant (l'enfermer dans le noir, lui faire peur...), ni humiliant ou violent (comportements relevant de la violence ou de la VEO - Violence éducative ordinaire
Il est bien évident que les conséquences délétères d'un tel usage sont non seulement à proscrire mais à dénoncer. Mais attention, ne jetons pas "le bébé avec l'eau du bain"!... Si certaines dérives ont raison d'être pointées du doigt, ne jetons pas tout en bloc : il reste tout d'abord qu'aucune recherche actuellement ne démontre significativement de contre-indication concernat le time-out, et par ailleurs, dans une approche bienveillante, il reste un outil incontournable.

L'étude datant de 2019 de Dadds et Tully*, montre en effet que le time-out n'engendrerait aucun effet délétère pour l'enfant y compris chez ceux ayant un passif de maltraitance ou des antécédents de traumatismes.

Quelle efficacité ?

Au-delà des avis subjectifs, et des représentations que chacun peut se faire du time-out, la question de l'efficacité se pose puisque le temps-mort vise un objectif : celui de diminuer ou faire disparaitre un comportement jugé inacceptable ou non souhaité.

Il est à noter qu'une large étude menée à Amsterdam en 2019 et supervisée par la chercheuse et professeure en Sciences de l'éducation, Patty Leijten, a mis en exergue deux pratiques qui ont largement démontré leur "efficacité" :
- La première est le "renforcement positif" qui consiste à donner à l'enfant un retour positif (le complimenter par exemple) au sujet de son comportement afin de l'encourager et le favoriser.
- La seconde est celle des "conséquences naturelles et logiques" qui répond  à un comportement de manière naturelle et logique donc. Comme retirer un objet des mains de l'enfant alors qu'il est en train de l'abimer.
- La pratique du time-out semble aussi être efficace toujours selon la même étude mais avec des proportions moins flagrantes. Peut-être parce que son application peut recouvrir plusieurs modalités qui ne se valent pas toutes ?...
En effet, en 2017, une étude américaine démontrait que 75% des parents américains utilisaient le time-out mais que 85% d'entre eux l'utilisaient de façon inapropriée et "non conforme au procédures garantissant son efficacité" et donc inefficace !...

 

Pour ou contre le Time-out ?

Les éléments recueillis montrent à quel point il serait réducteur de vouloir isoler le time-out, en supposant que toutes les manières de l'utiliser se valent.
Au contraire, il semble que (comme toute pratique), ce n'est pas tant l'intérêt "en soi" de la pratique ou de l'outil mais la manière dont on l'utilise.
Comme image, le couteau peut être un formidable outil dans la préparation d'un délicieux repas, comme il peut devenir une arme redoutable dans le cadre d'une agression...

De la même manière, le time-out peut être au service des plus mauvaises intentions (nuire à l'enfant, le rabaisser, l'humilier, le punir "gratuitement"...), comme il peut servir de plus nobles causes (responsabiliser l'enfant, poser un cadre rassurant, transmettre des codes sociaux...).

L'étude sus-citée donne quelques repères pour un usage efficace d'un point de vue éducatif mais surtout respectueux de l'enfant.

- Tout d'abord, il est déconseillé que le temps de mise à l'écart soit "trop long" et on le comprend bien, la durée devra être proportionnelle à l'âge de l'enfant (quelques minutes suffisent).
- Ensuite, le time-out ne doit pas être de premier recours. Il est préférable de mettre en avant les retours positifs (renforcement positif) : encouragements et compliments et ensuite, de stopper ces retours positifs (ce qui peut suffire à ce que l'enfant comprenne que son parent désapprouve son attitude) et éviter de se perdre en de trop longues explications (sauf si l'on est dans le cadre d'un "debriefing" - technique largement décrite dans l'atelier-parent sur la discipline bienveillante  : à découvrir ci-dessous).
- Par ailleurs, c'est le parent qui reste maitre de la situation - et non l'enfant - et décide entre autre de la fin du temps mort (par exemple après avoir vérifié que l'enfant était plus calme ou s'il estime que tout est revenu à la normale).
- Pour finir, le fait que l'enfant soit calme (sage) pendant ce temps mort n'est pas une évidence ou une nécessité : d'où l'importance de prévoir un "plan B" si l'enfant ne respecte pas le temps mort imposé par le parent.

Peut-on faire un usage "bienveillant" du time-out ?

Plusieurs auteurs et chercheurs se sont penchés sur cette question et des lignes communes émergent de telle sorte que nous pouvons identifier ce qui permet d'intégrer le time-out dans une approche éducative bienveillante et respectueuse de l'enfant.

- Tout d'abord, parce que le temps-mort induit des sentiments désagréables et s'apparente à une punition, il est établi qu'il doit figurer dans les stratégies de dernier recours, quand les autres approches ont échoué. Il ne s'agit par ailleurs en aucun cas d'utiliser le temps-mort dans le but de procurer des sentiments désagréables à l'enfant : il est un moyen, non un but ! Le but reste celui de l'objectif éducatif visant l'autonomie de l'enfant.

- Par ailleurs, le time-out n'apprend rien en tant que tel. Si apprentissage il doit y avoir, il se fera dans le cadre d'un débriefing avec l'enfant qui succédera à cette première intervention qui vise uniquement à interrompre le comportement non souhaité. (Pour en savoir plus sur le débriefing et la façon de l'utiliser, vous pouvez suivre les ateliers d'approfondissement présentés ci-dessous)

- Autre précaution, le time-out est à utiliser avec parcimonie. Il ne doit pas tomber dans une escalade perverse où le recours y serait  systématique (créant une habituation du côté de l'enfant), ou encore où d'autres pratiques punitives plus sévères seraient utilisées (spirale que l'on observe quand les résultats obtenus sont jugés insuffisants (souvent liés à une forme d'insensibilité de l'enfant provoquée par la répétition d'actions punitives) et qu'une surenchère répressive s'en suit, n'ayant pour résultat que des effets néfastes et dégradants pour l'enfant).

- Il est donc nécessaire de rappeler que le contexte autour de l'enfant doit avant tout nourrir des relations parent/enfant basées sur le respect et la confiance et que les actions privilégiées seront orientées vers le "renforcement positif" des comportements souhaités (terme emprunté à la psychologie comportementale). D'ailleurs, des alternatives sont apparues et se sont développées justement pour diminuer les "châtiments corporels" désormais interdits par la Loi française ainsi que les punitions sévères et tout ce qui touche à la Violence éducative ordinaire. Il ne s'agit en aucun cas donc de prôner (comme on peut le voir dans certains médias controversés) une "technique punitive" pour elle-même ni de cautionner la punition dans un sens unique de faire vivre à l'enfant un "mauvais moment"...

- Pour finir, son "bon usage" dépend de principes qui le soutendent et le rendent à la fois efficace et compatible avec une approche bienveillante. Ces principes ont été étudiés dans une méta-analyse et sont regroupés en 4 grands principes ci-dessous :

 

4 Principes pour un usage bienveillant du time-out

Voici les principes issus d'études récentes qui permettent d'envisager le time-out comme une pratique éducative acceptable et efficace :

PRINCIPE #1 : Utiliser le temps-mort pour des comportements dont l'enfant a le contrôle (délibérés) et non des comportements liés à des maladresses, des erreurs ou une incapacité liée à son immaturité.

PRINCIPE #2 : Le climat autour de l'enfant doit rester calme et propice à l'attachement : un contexte sécurisant sera aidant.

PRINCIPE #3 : L'efficacité du temps mort s'évalue à la diminution ou disparition du comportement inapproprié et entraine de fait une diminution de son usage pour le même comportement. En clair, si c'est efficace, on aura de moins en moins besoin de recourir à cette pratique.

PRINCIPE #4 : Les comportements attendus et ceux qui sont jugés inadaptés ou inacceptables par les parents doivent pouvoir être clairement explicités à l'enfant en amont. Ce n'est qu'à cette condition que le time-out sera utilisé : l'enfant est prévenu des conséquences d'un agissement (et n'est pas pris par surprise). C'est durant ce dialogue que les parents transmettent les valeurs qu'ils souhaitent inculquer à leur enfant (par exemple, ne pas taper un frère ou une soeur même si son attitude nous a semblée injuste mais privilégier la discussion : valeur de non-violence). Les comportements souhaités sont ainsi valorisés et l'enfant est clairement incité à opter pour certaines attitudes au détriment d'autres. Tout ceci devant pouvoir se discuter dans un cadre rassurant et ouvert.


 
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Sources

- A. R. Riley et al., A survey of parents perceptions and use of time-out compared to empirical evidence, Academic Pediatrics, 2017.
- M. R. Dadds et L. A. Tully, What is it to discipline a child should it be ? A reanalysis of time-out from the perspective of child mental health, attachment, and trauma. American Psychologist, 2019.
- Franck Ramus, Time-out, comment bien l'utiliser, Cerveau & Psycho,2024.


Rédigé par Nathalie Colin-Fagotin, Lu 36 fois



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