En parler ni trop tôt, ni trop tard
Le « bon moment », c’est quand l’enfant pose des questions, exprime un intérêt : il a besoin d’une réponse immédiate à ses interrogations.
Avant, il ne voit pas l’intérêt, et après, il sera sans doute passé à autre chose. Le meilleur moment est donc l’instant présent : même si la réponse n’est pas très élaborée ou que l’on réponde avec un : « je comprends que tu te questionnes, mais je préfère t’en parler un peu plus tard quand j’y aurai réfléchi » ; l’enfant aura compris qu’on prend en considération sa question, qu’on ne se défile pas et qu’il aura bientôt une réponse.
Restez naturel !
On peut s’appuyer sur des livres ou articles pour trouver des mots qui ne nous viennent pas spontanément. Mais il n’y a rien de mieux que de s’exprimer de la façon qui nous est la plus naturelle : donner le « petit nom » habituel (avec lequel on est à l’aise) au sexe féminin ou masculin, ne pas cacher qu’une question nous embarrasse, et dire ce qu’on pense (plutôt que dire « ce qu’on pense qu’on devrait dire » !). De toutes façons, votre ressenti, gêne, ou votre malaise, transparaitront; alors autant jouer « franc jeu » et rester sincère avec l’enfant.
Ne cherchez pas midi à quatorze heures !
Si votre enfant vous demande : « c’est quoi « faire l’amour » ? », ne paniquez pas : il y a là peut-être juste la question d’un enfant qui a entendu cette expression à l’école et qui ne comprend pas bien pourquoi les grands en parlent à demi-mots ou évitent le sujet devant lui …
Nous sommes parfois surpris par les raisons qui poussent un enfant à poser une question. Si vous découvrez que votre fille de 4 ans pense qu’un bisou sur la bouche d’un garçon, signifie « faire l’amour », ce ne sera pas nécessaire d’entrer dans les détails !
Respectez son intimité : pas d’intrusion
Un autre repère à respecter est celui de l’intimité de chacun.
Mieux vaut répondre à l’enfant sans lui poser de question embarrassante sur lui et sans dévoiler les détails de votre propre vie intime (« tu vois, papa et maman par exemple… ») : certaines révélations pourraient être choquantes pour lui. Il faut donc respecter la pudeur de l’enfant en respectant cette limite.
D’ailleurs les enfants, spontanément, posent d’eux-mêmes une limite à leur entourage en exprimant une gêne à être regardé (nu(e)) par les autres (y compris les parents), à se cacher quand ils se changent. C’est le signe qu’ils ont pris conscience que certaines parties du corps, plus « intimes », demandaient à être protégées du regard de l’autre, dissimulées. C'est l'âge de la "pudeur".
De quoi faut-il parler aux jeunes enfants ?
Suivant l’âge de l’enfant, les questions ne seront pas les mêmes bien sûr, et donc, les mots et les détails qu’on lui donnera ne seront nécessairement pas les mêmes.
Dès 3 ans, l’enfant s’interroge sur son corps, sur celui de l’autre et commence à prendre conscience de la « différence des sexes » : c’est à dire, ce qui fait que le corps d’un garçon et d’une fille sont différents. Il voudra « nommer » les parties de son corps et utilisera les mots que vous avez utilisés jusqu’à maintenant pour nommer son sexe ou d’autres parties liées indirectement à la sexualité plus tard : fesses et seins notamment. La plupart du temps, il s’agira du nom familier que l’enfant utilise déjà quand il en parle.
D'ailleurs dans ses jeux, des allusions à cet intérêt nouveau, apparaitront : vocabulaire, curiosité, gestes ciblant certaines parties du corps, etc. Il va d’abord exprimer sa curiosité autour de cette différence garçon/fille.
A cet âge, on peut parler du corps, aider l’enfant à le découvrir et le nommer et aussi commencer à poser quelques règles (autour du corps en collectivité par exemple).
Vers 5 ans, il deviendra de plus en plus intéressé par le « comment ça marche ». Il voudra comprendre « comment on fait les bébés ? », et « que font des amoureux ? », même si son intérêt peut d’abord sembler ambivalent : il va par exemple exprimer du dégoût devant ses parents qui s’embrassent…
A travers ses jeux et ses interrogations, il tente de mieux comprendre la différence des sexes et des genres et tente de se situer par rapport aux autres. Il est en pleine construction identitaire sexualisée; c’est à dire ce qui le définit en tant que garçon ou fille. Ce qui ne veut pas dire qu’il est capable de comprendre toutes les subtilités liées à la différence des sexes; ce n’est que la première étape d’un processus qui va se poursuivre jusqu’à la fin de l’adolescence.
4-6 ans, c’est aussi l’âge où l’enfant intègre des interdits fondamentaux concernant la différence des sexes. Le rôle des parents est aussi de poser clairement ces limites qui distingueront ce qu’il est « permis de faire » (seul, avec les autres) et ce qui ne l’est pas.
Dans certaines situations, l’enfant « teste » ses parents en les obligeant à se situer et à donner une réponse claire : au travers de jeux, de gestes ou autres. Bien sûr ces situations peuvent être déstabilisantes pour un parent, mais elles sont essentielles et structurantes pour l'enfant.
Pour vous aider à trouver « les bons mots » quelques pistes :
Ce n’est pas toujours simples d’aborder la question de la sexualité, avec naturel et aisance, surtout avec ses enfants.
Voici quelques moyens pour vous y aider :
- Pour avoir des idées de réponses, des livres existent, adressés aux parents ou aux enfants : Certains, avec l’appui d’une petite histoire, abordent « mine de rien », les questions autour de la sexualité. Vous trouverez ICI, une sélection de questions couramment posées par les enfants et des propositions de réponses (Réservé aux inscrits).
- Une attitude sans mot peut aussi suffire : un regard sans jugement en surprenant les jeux de découverte sexuelle (normaux à cet âge) de son propre enfant, confirme à la fois la normalité de tels jeux et ne suscitera ni honte, ni culpabilité chez l’enfant. D'autres gestes peuvent accompagner un interdit posé : "Tu n'as pas le droit de toucher cette partie de mon corps", sans culpabilisation, mais clairement.
- Nous sommes marqués en tant que parents, par notre propre éducation et avons intériorisé des « tabous », des « mots interdits », et des émotions, souvent ambivalentes autour de la sexualité. Quand c’est le cas, et si l’on souhaite avoir un dialogue plus ouvert avec ses enfants, on peut se faire aider en utilisant les « mots des autres » par exemple, mais si l’on veut aller plus loin, les questions de nos enfants peuvent être l’occasion de pointer des « zones d’ombre » à éclairer, au travers d’une thérapie par exemple, quand cela entraine de véritables blocages relationnels.
Une affaire de coparentalité
Les deux parents ont leur rôle à jouer dans l’éducation à la sexualité de leurs enfants : un papa expliquera plus aisément à son garçon certaines « choses de la vie », quand une maman sera plus à l’aise avec sa fille. De plus, les enfants intégreront les informations différemment si elles sont dites par le « parent du même sexe »; c’est pourquoi les deux parents ont un rôle essentiel à jouer auprès de leurs enfants, qu’ils soient garçons ou filles.
Pour aller plus loin :
Retrouvez des exemples de réponses aux 5 questions essentielles des enfants au sujet de la sexualité ICI (Réservé aux inscrits).
Biblio : Questions d’amour, V. Dumont & S. Montagnat, éd. Nathan, 2005.